[Une conférence avec Michèle Benhaïm, psychologue clinicienne, psychanalyste qui s'est tenue le vendredi 23 juin 2023]

Décrochages, dépressions, anxiétés, crises d’angoisse, troubles du comportement, automutilations, suicides…sont aujourd’hui le reflet de la santé mentale des adolescents à l’image d’un monde en crise.

L’adolescent déjà pris dans le tourbillon des changements pubertaires doit aujourd’hui faire face à un monde qui se dérobe sous ses pieds, au moment où il a justement besoin d’appuis solides.

Les défis sur les réseaux sociaux font aujourd’hui partie du quotidien. Véhiculés par la masse des plates-formes, ils naissent et meurent soudainement. Ce texte décrypte les fonctionnements de ces défis (Necknomination, Mannequin Challenge, Momo Challenge, Blue Whale Challenge…) dans la logique du processus adolescent. Entre panique morale et amplification caricaturale de ces phénomènes dans les médias, les éducateurs doivent-ils s’en alarmer ? Car les défis se propagent également, de façon parfois inquiétante, chez les adultes (défi des mamans, Cheese Challenge…).

La période de confinement que nous vivons est exigeante pour les parents appelés à devenir 24h/24 sans répit les chefs d’orchestre d’un accordage familial suffisant sans pouvoir s’appuyer comme habituellement sur les différents réseaux : école, voisins, logopèdes, crèche, grands-parents,…. La nécessité de l’entraide entre parents, de la présence solide du réseau social environnant et des professionnels de l’aide s’affirme plus que jamais dans cette période où justement, ces ressources ne se déploient plus dans les mêmes modalités.

Un entretien avec Angélique Gozlan, docteure en psychopathologie et psychanalyse. 

Dans de nombreuses situations de (cyber) harcèlement, l'agresseur a une faible estime de lui, peu confiance en lui, ce qui l'insécurise... et donc il harcèle pour ne pas être harcelé.  

Il y a d'autres situations ou l'auteur a été victime par le passé et cherche à se faire une nouvelle place, un nouveau statut plus "prestigieux' dans la communauté. Cette violence envers l'autre lui donne l'illusion d'être protégé de la violence du groupe et de leur propre violence. 

Pour aller plus loin : Le harcèlement virtuel

 

Un entretien avec Angélique Gozlan, docteure en psychopathologie et psychanalyse. 

L'école a une place centrale dans les situations de cyber harcèlement. En effet, dans beaucoup de situations, ce qui se joue derrière les écrans a un impact sur ce qui se passe entre les murs de l'école. 

L'école a un rôle important dans l'observation des signes de souffrance tels que l'absentéisme, le manque d'attention, l'agitation que l'un ou l'autre adolesent peut présenter...

Lieu de vie majeur des adolescents, l'école a un rôle de maillon essentiel entre d'un coté le groupe classe et de l'autre les parents. Il s'agit d'articuler les différentes sphères de vie des adolescents pour permettre qu'une prévention et une prise en charge puissent émerger. 

Pour aller plus loin : Le harcèlement virtuel

Un entretien avec Angélique Gozlan, docteure en psychopathologie et psychanalyse.

Sur la toile, l'absence de présence physique entre les individus entraine une levée des inhibitions. Cette impression d'irréalité peut engendrer des déferlements de haine très violents. 

Or, ces communautés virtuelles sont composées de gens bien réels et ce qui se dit sur les réseaux a des conséquences sur le psychisme. Ce qu'on lit et voit sur internet nous impacte.

Pour aller plus loin : Le harcèlement virtuel

De tout temps, la jeunesse en quête de sens et de valeur à exister s’inscrit dans une métamorphose identitaire. Aujourd’hui, en rupture de perspectives et de références puissantes pour se sentir exister, des jeunes hommes et femmes sont  touchés par l’islamisme radical.

Aucune équation psychologique ou sociologique ne donne une explication univoque de la radicalisation. Ce qui vaut pour l’un ne vaut pas pour l’autre.

De jeunes convertis en quête de pureté et de spiritualité issus de classes moyennes ou privilégiées côtoient des jeunes de milieux populaires ayant souvent un parcours de délinquance. La radicalisation se nourrit de grandes figures anthropologiques : ordalie,sacrifice, disparition de soi... Les stéréotypes de genre sont exacerbés : les filles vouées au mariage et à la maternité, les hommes à la guerre. 

La violence des jeunes fait l’objet d’inquiétudes grandissantes. Dans les pays européens d’après-guerre, la cause de l’enfant en danger mobilisa l’opinion. Aujourd’hui c’est l’enfant dangereux qui est dénoncé, incarné par des figures comme le «  jeune de quartier  » ou le «  jeune radicalisé  ».

Ce livre décrit et analyse les lignes de force de ce mouvement. Il tente d’expliciter qui sont ces jeunes délinquants ou violents et quels sont les actes ou les comportements qu’on leur reproche.

La pénalisation des agissements turbulents juvéniles n’est pas l’unique solution, en dépit du recours croissant à la justice observé ces derniers temps. Il faut aussi pouvoir compter sur les adultes, les familles et les parents. Et comme l’optique punitive a souvent montré ses limites, il convient de redire la force et l’efficacité de la pratique éducative et de la prévention.

Les écrans sont partout. Fenêtres sur le monde et interfaces interactives, ils incarnent une nouvelle donne technologique et sociale qui métisse « culture du livre » et « culture du numérique ».

Plongés dans cette réalité, nous sommes contraints au tâtonnement. Mais notre place d’adulte et d’éducateur reste au-devant de la scène et confirme notre position éducative et de transmission.

« L'adolescence est un âge contradictoire où le rejet de l'adulte est à la mesure du besoin que l'adolescent en a », analyse Philippe Jeammet.

Les conflits naissent de la tension entre la peur de l'abandon et l'angoisse d'intrusion du jeune. Ce paradoxe peut pousser certains adolescents à la destructivité comme créativité du pauvre, c'est-à-dire de celui qui se sent impuissant. Avant de s'effondrer, de disparaître, un acte de vie, prométhéen en quelque sorte, reste toujours possible : détruire !