Lors d'une visioconférence avec des pédopsychiatres, le chef de l'Etat a annoncé la tenue, avant l'été, d'Assises de la psychiatrie et de la santé mentale, avec un volet dédié à l'enfance et à la jeunesse. Il a aussi "approuvé le remboursement des soins de psychologues en libéral, notamment pour les enfants", remboursement déjà expérimenté dans quatre départements. Une semaine plus tôt, Olivier Véran avait déjà annoncé plusieurs mesures dans le cadre de la campagne tarifaire et budgétaire des établissements de santé.

La crise sanitaire et ses corollaires – confinements, couvre-feu,  réduction des interactions sociales... – font monter les préoccupations autour de la santé mentale, et notamment celle des enfants et des jeunes. Dans son récent rapport, la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse s'inquiétait d'ailleurs des possibles conséquences de cet événement hors norme. Et les suicides ou tentatives de suicides d'étudiants, mais aussi de jeunes de moins de 16 ans, confirment les inquiétudes en la matière. Au point de susciter l'intervention du chef de l'État.

Vers une généralisation de la prise en charge des consultations de psychologue

Lors d'une visioconférence organisée le 14 janvier avec des pédopsychiatres, Emmanuel Macron a en effet annoncé la tenue, avant l'été, d'Assises de la psychiatrie et de la santé mentale. Celles-ci auront une portée générale, mais comporteront un volet dédié à l'enfance et à la jeunesse. Même s'il est difficile de disposer de chiffres précis en la matière, les interlocuteurs du Président ont insisté sur la hausse continue du nombre d'enfants souffrant de troubles depuis quelques années. Selon eux, cette tendance était en effet déjà à l'oeuvre avant la pandémie, mais s'est fortement accélérée avec la crise sanitaire. Ils évoquent notamment des hausses massives d'hospitalisations pour troubles de l'humeur, troubles alimentaires ou encore comportements anxieux, avec des progressions allant de 50% à plus de 100% par rapport à 2019.
Outre la tenue d'Assises de la psychiatrie et de la santé mentale, Emmanuel Macron a également annoncé d'autres mesures. Selon le compte rendu de l'Élysée, il a "approuvé le remboursement des soins de psychologues en libéral, notamment pour les enfants, afin de les rendre accessibles au plus grand nombre". En pratique, l'expérimentation du remboursement des consultations des psychologues par l'assurance maladie, expérimentée depuis plus de deux ans dans quatre départements (Bouches-du-Rhône, Haute-Garonne, Landes, Morbihan) pourrait être rapidement généralisée. Le chef de l'État a aussi approuvé le lancement, dès le printemps, d'une enquête nationale de Santé publique France sur la santé mentale des jeunes et des enfants. Enfin, il a souhaité que soient évoquées au cours de ces Assises la question de la tarification et celle du renforcement de la médecine scolaire. Cette dernière pourrait, par ailleurs, faire l'objet d'un transfert aux départements, qui gèrent déjà la PMI, dans le cadre du projet de loi 4D.

Un redressement engagé dès 2018

Les pouvoirs publics étaient déjà conscients de cette situation de tension sur la psychiatrie. Le 18 novembre 2020, Olivier Véran assurait ainsi que le gouvernement voulait "à tout prix éviter une troisième vague, celle de la santé mentale". Dans le prolongement de cette affirmation, le ministre de la Santé a annoncé le 7 janvier plusieurs mesures dans le cadre de la troisième circulaire relative à la campagne tarifaire et budgétaire 2020 des établissements de santé.
La principale est la création d'une enveloppe supplémentaire de 50 millions d'euros dédiée à la psychiatrie. Il s'agit en l'occurrence de la mise en œuvre de la feuille de route "Santé mentale et psychiatrie" et de sa traduction dans le plan "Ma santé 2022", annoncé en septembre 2018 par Emmanuel Macron. Une enveloppe de 20 millions d'euros permettra de financer 48 projets ciblés sur la psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent (dans le cadre d'un second appel à projets après celui de 2019). Une autre enveloppe de 30 millions d'euros financera deux projets importants. D'une part, l'abondement de 20 millions d'euros (soit un doublement de sa dotation 2020) du fonds d'innovation organisationnelle en psychiatrie, qui va financer près de 80 projets. D'autre part, la création de 160 postes de psychologues au sein des CMP (centres médico-psychologiques), prévue dans le cadre du Ségur de la santé.
Pour mémoire, on rappellera qu'Agnès Buzyn, alors ministre des Solidarités et de la Santé, avait déjà alloué à la psychiatrie, dans les derniers jours de décembre 2018, une enveloppe supplémentaire pérenne de 50 millions d'euros à la psychiatrie, avec pour objectif de "répondre aux difficultés du secteur et engager les transformations nécessaires, en cohérence avec les attentes légitimes des patients et des familles".

Par Jean Noël Escudié / P2C pour Localtis
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